François Coppée

Promenades et Intérieurs


Verlaine, Rimbaud, Cros, Nouveau

Dixains Réalistes
et autres « Vieux Coppées »


François COPPÉE : Promenades et Intérieurs

Lecteur, à toi ces vers, graves historiens
Prisonnier d'un bureau, je connais le plaisir
C'est vrai, j'aime Paris d'une amitié malsaine ;
J'adore la banlieue avec ses champs en friche
Le soir, au coin du feu, j'ai pensé bien des fois
N'êtes-vous pas jaloux en voyant attablés,
Vous en rirez. Mais j'ai toujours trouvé touchants
Un rêve de bonheur qui souvent m'accompagne,
Quand sont finis le feu d'artifice et la fête,
Quelqu'un a-t-il noté le désir hystérique
C'est un boudoir meublé dans le goût de l'Empire,
Champêtres et lointains quartiers, je vous préfère
Le Grand-Montrouge est loin, et le dur charretier
J'écris près de la lampe. Il fait bon. Rien ne bouge.
Volupté des parfums ! - Oui, toute odeur est fée.
Noces du samedi ! noces où l'on s'amuse,
Tel un chasseur perclus, devant un feu qui flambe,
L'école. Des murs blancs, des gradins noirs, et puis
En province, l'été. Le salon Louis Seize
Depuis que son garçon est parti pour la guerre,
N'est-ce pas ? ce serait un bonheur peu vulgaire
Il a neigé la veille et, tout le jour, il gèle.
De la rue on entend sa plaintive chanson.
Dans ces bals qu'en hiver les mères de famille
Comme à cinq ans on est une grande personne,
Je rêve, tant Paris m'est parfois un enfer,
Vous êtes dans le vrai, canotiers, calicots !
Assis, les pieds pendants, sous l'arche du vieux pont,
Malgré ses soixante ans, le joyeux invalide
Sur un trottoir désert du faubourg Saint-Germain,
Elle sait que l'attente est un cruel supplice,
De même que Rousseau jadis fondait en pleurs
Le printemps est charmant dans le jardin des Plantes.
En plein soleil, le long du chemin de halage,
Près du rail, où souvent passe comme un éclair
L'allée est droite et longue, et sur le ciel d'hiver
Hier, sur la grand'route où j'ai passé près d'eux,
Comme le champ de foire est désert, la baraque
J'écris ces vers, ainsi qu'on fait des cigarettes,


Paul VERLAINE

Pour charmer tes ennuis, ô temps qui nous dévastes,
Bien souvent dédaigneux des plaisirs de mon âge
Dites, n'avez-vous pas, lecteurs, l'âme attendrie,
BOUILLONS-DUVAL : Digne et modeste dans sa chaire d'acajou
Souvenir d'une enfance austèrement bébête
Les écrevisses ont mangé mon coeur qui saigne,
PAYSAGE : Vers Saint-Denis c'est bête et sale la campagne
TANTALIZED : L'aile où je suis donnant juste sur une gare,
Le sous-chef est absent du bureau : j'en profite
Endiguons les ruisseaux : les prés burent assez.


Arthur RIMBAUD

Je préfère sans doute, au printemps, la guinguette
Aux livres de chevet, livres de l'art serein,
LE BALAI : C'est un humble balai de chiendent, trop dur
Les soirs d'été, sous l'oeil ardent des devantures,
ÉTAT DE SIÈGE ? : Le pauvre postillon, sous le dais de fer-blanc,
J'occupais un wagon de troisième : un vieux prêtre


Charles CROS

FIAT LUX : Il marche à l'heure vague où le jour tombe. Il marche,
GAGNE-PETIT : Il a tout fait, tous les métiers. Sa simple vie
PAYSAGE : Versailles où l'éclat des roses s'échelonne,
CROQUIS DE DOS : Il travaille, le jour, dans un bazar tout neuf,
SONGE D'ÉTÉ : À d'autres les ciels bleus ou les ciels tourmentés,
RÉSIPISCENCE : Celle qui m'apparaît, quand je clos mes yeux las,
NOCEUR : Après avoir vidé toutes les coupes, toutes !
MORALE : Sur des chevaux de bois enfiler des anneaux,
BÉNÉDICTION : Des femmes en peignoir, portant la boîte au lait,
VUE SUR LA COUR : La cuisine est très-propre, et le pot-au-feu bout
PITUITE : Ayant tout essayé, blême, je ne crois plus
TABLEAU : Enclavé dans les rails, engraissé de scories,
COEUR SIMPLE : Dans les douces tiédeurs des chambres d'accouchées


Germain NOUVEAU

Cheminant Rue aux Ours, un soir que dans la neige
Muses, souvenez-vous du guerrier,- de l'ancien
C'est à la femme à barbe, hélas ! qu'il est allé,
On s'aimait, comme dans les romans sans nuage,
À L'ÉGLISE : Elle était à genoux et montrait son derrière
On m'a mis au collège (oh ! les parents, c'est lâche !)
J'ai du goût pour la flâne, et j'aime, par les rues,
Je courais la Russie... - Oui, Monsieur, me dit-elle,
J'entrais chez le marchand de meubles, et là, triste,
Octobre, vers le vieux château, dont le portail


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